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Les Etats-Unis ont perverti l'int�grit� des inspections en Irak. Les nouvelles inspections devront �tre contr�l�es de pr�s:

Donner une chance � la paix,

par  Scott Ritter

Le Monde, le 25  septembre 2002.

Centre for Research on Globalisation (CRG),  Centre de recherche sur la mondialisation (CRM),  globalresearch.ca ,   27 September/ septembre 2002

Il est imp�ratif que l'administration Bush m�ne une mise en accusation juste de l'Irak, parfaitement conforme � la lettre et � l'esprit de la loi. Si l'Irak et, en particulier, Saddam Hussein s'�cartent vraiment de la loi de fa�on criminelle, comme le pr�tend George W. Bush, c'est au plaignant (dans ce cas, les Etats-Unis) de garantir que l'instruction est men�e de mani�re � prot�ger l'int�grit� du processus de la justice pr�vu par la Charte des Nations unies. Si l'accusation expose avec succ�s son cas devant la "cour" (dans ce cas, le Conseil de s�curit�), elle doit s'assurer que les "enqu�teurs de la police" (les inspecteurs du d�sarmement des Nations unies) ne d�vient pas d'un iota de la t�che de d�sarmement que leur a confi�e le Conseil de s�curit�.

La vigilance de la justice ne suffira pas, pas plus que le fait de court-circuiter son processus. Pr�juger l'issue de cette enqu�te � comme l'ont fait de mani�re r�p�t�e le pr�sident am�ricain et son administration � trouble ce processus. Il faut contenir les partisans belliqueux de la guerre contre l'Irak. Il existe sans doute de bonnes raisons de faire la guerre � l'Irak, raisons qui impliquent l'�limination de son pr�sident tyrannique et de son r�gime brutal. Mais ces raisons doivent �tre expos�es sans interf�rences.

La Charte des Nations unies �tablit les conditions que doivent respecter les nations pour d�clarer la guerre sans violer les lois internationales. L'une d'elles est l'invocation de l'article 51, qui permet � une nation d'agir pour se d�fendre lorsqu'elle est attaqu�e. C'est ainsi qu'ont proc�d� les Etats-Unis dans leur guerre contre le terrorisme, en toute l�gitimit� par rapport aux lois internationales.

Autre condition : l'approbation par le Conseil de s�curit� d'une r�solution se r�f�rant au chapitre VII de la Charte des Nations unies, qui autorise l'usage des forces arm�es pour r�pondre � une menace claire et imminente contre la paix et la s�curit� internationales. C'est ce qui s'est pass� en 1990, quand le Conseil a approuv� la r�solution 678, ouvrant la voie � l'op�ration "Temp�te du d�sert" et � la lib�ration du Kowe�t en 1991. M. Bush a judicieusement choisi de porter son cas devant les Nations unies. En reconnaissant la l�gitimit� de la proc�dure de cette organisation, il a aussi eu raison de montrer que le processus de la justice internationale ne fonctionne que s'il est appliqu� correctement. Le cadre de la l�galit� n'a pas de sens tant qu'il reste th�orique. Ce n'est pas le moment de parler de guerre, mais plut�t de mise en pratique de la loi et de promesses de paix, de stabilit� et de s�curit�. Sur la question du d�sarmement, l'Irak ne peut pas �tre jug� d'avance! . Il faut lui donner l'occasion de s'expliquer. Si l'Irak poss�de de telles armes, il doit le d�clarer ouvertement, sans tromperie ni dissimulation comme par le pass�. Si l'Irak ne poss�de pas ces armes, il doit coop�rer pleinement avec les inspecteurs du d�sarmement de sorte que ses affirmations puissent �tre v�rifi�es. Si l'Irak retombe dans les pratiques du pass�, s'il ment, dissimule et emp�che le travail des inspecteurs, sa responsabilit� redevient d'actualit�. Apr�s avoir arr�t� l'Irak au bord du gouffre, nous comprenons tous qu'il ne peut y avoir de seconde chance. Si l'Irak transgresse ses obligations, la r�gle des trois coups s'applique : culpabilit�, condamnation, pas de libert� conditionnelle. A ce moment-l�, M. Bush pourra mettre en avant les belliqueux, se pr�senter devant le Conseil de S�curit� et r�clamer l'application cat�gorique de la loi. Et, cette fois, le monde sera avec lui. Mais il ne peut y avoir de pr�somption de culpabilit�. En adoptant le principe d! e la loi et en cherchant � rendre le r�gime de Saddam Hussein r! esponsable face � cette loi, les Etats-Unis doivent comprendre que le processus d'investigation ne m�ne pas automatiquement � la condamnation. La porte doit rester ouverte � l'�ventualit� que l'Irak soit en fait d�pourvu d'armes de destruction massive et ne constitue pas un danger pour la s�curit� internationale. Face � cette possibilit�, les Etats-Unis et la communaut� internationale ont la responsabilit� de remplir leurs obligations et de traiter l'Irak avec impartialit�. Cela signifie que les sanctions �conomiques actuelles contre l'Irak, en rapport avec sa soumission, doivent �tre lev�es et que le contr�le de l'�conomie irakienne doit �tre rendu au gouvernement de ce pays.

En allant aux Nations unies, M. Bush a fait mine de faire appel � la loi internationale, mais la politique mise en �uvre par son administration demeure en violation flagrante de cette loi. L'administration Bush n'a pas cach� que son objectif politique principal �tait l'�limination du r�gime. Malheureusement, l'�limination d'un r�gime est incompatible avec la Charte des Nations unies, qui interdit formellement � toute nation d'intervenir dans la politique int�rieure d'un Etat souverain. M. Bush et ses conseillers belliqueux sont parvenus � faire admettre l'�limination du r�gime irakien au Congr�s et au peuple am�ricain en exploitant la politique de la peur, tactique particuli�rement efficace dans le climat de l'apr�s-11 septembre 2001. Tant que l'Irak refusait d'autoriser le retour des inspecteurs du d�sarmement, l'administration Bush pouvait exploiter la perception d'une menace irakienne imminente. Toutefois, avec la perspective du retour des inspecteurs du d�sarmement, l'ad! ministration est contrainte de s'appuyer sur des faits quand elle �value cette menace. Maintenant que les inspecteurs sont sur le point de reprendre leur travail, la th�orie n'est plus admissible. Les faits remplacent la fiction, la v�rit� l'emporte sur l'ignorance. Si l'Irak constitue une menace appelant la guerre, le monde le saura rapidement. Mais s'il est �tabli que l'Irak n'est pas une menace, la loi doit s'appliquer. Si les inspecteurs trouvent que l'Irak se soumet � ses obligations de d�sarmement, la communaut� internationale doit tenir ses engagements, lever l'embargo sur le p�trole, rendre le contr�le de l'�conomie irakienne au gouvernement irakien et accueillir � nouveau l'Irak dans la communaut� internationale, m�me si cela signifie que Saddam Hussein reste aux commandes. C'est bien la derni�re chose que souhaite l'administration Bush. Tel est le d�faut inh�rent au processus dans son ensemble : tant que les Etats-Unis placent l'�limination du r�gime avant le d�sar! mement, le processus du d�sarmement demeure vici�. M�me si Hans! Blix et son �quipe parviennent � maintenir l'int�grit� du processus d'inspection en �cartant les agents de renseignement �trangers, cette action restera inutile tant que les Etats-Unis conserveront leur politique d'�limination du r�gime. Pour surmonter cet obstacle, l'investigation doit �tre rigoureuse et contr�l�e. Il faut que les Nations unies reconnaissent que, si l'Irak a l'obligation d'autoriser les inspections sans conditions, la communaut� internationale a l'obligation de conduire une investigation loyale. Il suffit de se souvenir de la derni�re fois que l'Irak a �t� soumis � des inspections de d�sarmement sans conditions pour comprendre que la question n'est pas simple.

Pourquoi n'y a-t-il pas eu d'inspections en Irak ces quatre derni�res ann�es ? Le gouvernement irakien n'a pas expuls� les inspecteurs. Ce sont les Etats-Unis qui leur ont donn� l'ordre de quitter l'Irak apr�s avoir manipul� le programme d'inspection pour provoquer une crise entre les inspecteurs et l'Irak, puis avoir utilis� la crise pour d�clencher une r�ponse militaire contre l'Irak, tout cela sans passer devant le Conseil de s�curit� pour demander son approbation ou le consulter.

En outre, la campagne de bombardements men�e � la suite de cette manipulation a concentr� ses efforts, non pas sur la capacit� de l'Irak � produire des armes de destruction massive, mais sur Saddam Hussein et le dispositif de s�curit� qui l'entoure. Les bombes am�ricaines �taient guid�es vers leurs objectifs par les renseignements rassembl�s par des inspecteurs qui ne s'occupaient pas de l'obligation de d�sarmement de l'Irak. Les Etats-Unis ont perverti l'int�grit� des inspections. Le Conseil de s�curit� a r�pondu par la dissolution du pr�c�dent programme d'inspection et par la cr�ation d'un nouveau, dirig� par Hans Blix. Mais l'Irak n'�tait pas dispos� � permettre la reprise des inspections, compte tenu de ce pr�c�dent. L'Irak r�clamait des conditions avant la reprise du processus de d�sarmement. Ces conditions n'�taient pas d�raisonnables, apr�s ce qui s'�tait produit. Les nouvelles inspections devront �tre contr�l�es de pr�s de sorte que le public retrouve foi et confianc! e en l'aptitude des inspecteurs � mener leur t�che avec impartialit� et objectivit�. Ce contr�le pourrait prendre la forme d'un "courtier honn�te" ind�pendant, une nation ou un groupe de nations pr�tes � mettre en jeu leur r�putation pour garantir l'impartialit� de leur travail. Ce n'est pas une th�orie, mais une r�alit�. D�j�, le Canada a fait part de son d�sir d'�tre partie prenante. L'Afrique du Sud et la Belgique pourraient bient�t suivre. Ce m�canisme donne une chance � la paix.


Scott Ritter est ancien chef des inspecteurs des Nations unies pour le d�sarmement en Irak (1991-1998). Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Florence L�vy-Paoloni. � 2002 Scott Ritter/Los Angeles Times.  For fair use only/ pour usage �quitable seulement .


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